Quand on pense aux whiskies de Suntory, le conglomérat de boissons japonais, on ne peut s’’empêcher de penser à l’un des plus grands films de voyage de tous les temps : Lost in Translation de Sofia Coppola. Le personnage de Bill Murray, une star hollywoodienne fanée, filme des publicités pour le whisky Suntory à Tokyo où il passe une semaine dans l’hôtel Park Hyatt, une entreprise aliénante. Comme tous les meilleurs films de voyage, Lost in Translations’agit bien d’un voyage intérieur ou, dans ce cas, d’une sorte de dérive intérieure.
Ici, l’éloignement du personnage est triple distillé, il est déconcerté par la culture japonaise, par sa propre image et par ce que sa vie est devenue, et cette déconnexion est accentuée par le silence aseptisé des couloirs à moquette douce du Park Hyatt et faiblement éclairé, bars arrosés de piano, où il sirote ses whiskies gratuits. La bonne nouvelle est que le whisky fonctionne. Le film aussi.
Pour le meilleur ou pour le pire, Suntory est à jamais associé dans votre esprit à la surréalité et même dans le monde globalisé d’aujourd’hui, il y a quelque chose de surréaliste dans l’idée que Suntory, dont le siège est à Tokyo, possède (parmi d’autres whiskies écossais) Auchentoshan : une distillerie qui, pour l’oreille non avertie sonne presque japonais mais a été fondée à 9000 km de Tokyo à la périphérie de Glasgow, ses briques blanches et ses linteaux noirs et ses lettres surplombant la rive nord de la Clyde.
Voici une vidéo montrant cette distillerie :
Un domaine appelé ‘Auchentoshan’, signifiant ‘coin du champ’ en gaélique écossais, a été enregistré au 16e siècle. Certains disent que le whisky y était produit dès 1800. En 1817, nous savons que le whisky s’appelait Duntocher et appartenait à un certain John Bulloch. Après la faillite de Bulloch, un ingénieur appelé Thorne a obtenu une licence en 1823 et a nommé sa distillerie (qui peut ou non avoir été Duntocher) Auchintoshan. Il y a aussi des discussions presque hérétiques sur les liens avec l’Irlande en raison de la méthode de triple distillation, inhabituelle en Écosse.
Auchentoshan (prononcé ‘ock*en*tosh*en’) a des notes de fond de biscuits, d’herbe, d’acétone. Différents fûts de maturation confèrent alors des caractères différents. Le bourbon prête du caramel et de la marmelade. Le sherry Oloroso donne un profil plus cacaoté et de fruits noirs. Pour l’amateur ou le collectionneur, des embouteillages spéciaux sortent occasionnellement, la plus ancienne date de 1957 et n’est sorti qu’en 2008. Il a été comparé à la crème caramel, au tabac, à l’eucalyptus, aux copeaux de crayon et au thé à la menthe. Si vous souhaitez le goûter par vous-même, vous feriez mieux d’avoir les poches pleines, c’est-à-dire si vous pouvez trouver une bouteille encore à vendre.
De retour sur terre, la beauté d’Auchentoshan réside dans le fait qu’il s’agit d’un whisky de style « Lowland », doux et accessible même au buveur le plus timide. Sa triple distillation le rend encore plus léger que ses autres compatriotes des Lowlands. En effet, il est si léger et onctueux que certains l’appellent un whisky du petit-déjeuner, ce qui me fait penser à quelque chose d’Alice’s Wonderland.
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